Je ne résiste pas au plaisir de vous faire partager le film de 5 minutes présentant l’ascension d’une voie nouvelle en face nord du Thalay Sagar.
Une des très belles montagnes du monde!
En septembre 2016 les alpinistes russes Dmitry Golovchenko, Dmitry Grigoriev et Sergey Nilov ont passé 9 jours pour gravir « moveable feast » 1200 mètres M7, glace 5, 5c et A3. Et 2 jours pour revenir par la voie « normale ». Ils ont ramené de superbes images, cliquez ici pour voir la vidéo!
En 2003, avec Patrice Glairon-Rappaz j’avais eu la chance d’ouvrir une goulotte géniale, voir ci-dessous.
10 jours en septembre 2003 pour gravir One way ticket 1200 mètres glace 6 et M6.
Une aventure extraordinaire avec nuits sur portaledge.
Nos amis Patrick Pessi et Jérôme Thinières étaient avec nous les 4 premiers bivouacs sur les 500 premiers mètres :
Le tracé de la partie haute de One way ticket :
2 petites journées d’approche depuis Gangotri et nous atteignons le camp de base à 4700 mètres.
Grâce aux porteurs nous avons tout notre matériel technique et les vivres pour 5 semaines :
Le Thalay Sagar apparaît.
Malgré les apparences nous avons eu 3 semaines de pluies. Bien du temps pour s’acclimater et que de belles goulottes se forment…
Le camp de base avancé :
Encore un tracé de notre voie One way ticket vue du camp de base avancé :
En 2003, ce n’est pourtant pas si loin, j’ai l’impression de parler du temps jadis, les appareils photo numériques pointaient le bout du nez, toutes les photos sont prises avec celui de Patrice.
Et surtout nous n’avions pas de téléphone satellite, donc pas de nouvelles pour la famille ni de prévisions météo pour nous…
Nous partons avec 2 portaledges 2 places et une bonne dizaine de jours d’autonomie :
Jérôme Thinières au premier bivouac :
Patrick Pessi et Jérôme Thinières au matin du premier bivouac :
Une montagne parfaite,
une paroi parfaite,
des conditions de glace parfaites,
un rêve d’alpiniste prend forme :
Le soir du second bivouac le mauvais temps nous tombe dessus :
Les deux plus grands gabarits Jérôme et Patrick partagent le grand portaledge.
Nous passons deux jours dans le mauvais temps :
A Delhi fin août il a fait une température record de 48°, notre fret a dû prendre chaud…
Une soupe avariée m’a bien rendu malade! A 6200 j’ai pris bien bien cher!
De son côté Patrice est en bonne forme :
Le second jour d’attente, à la faveur d’une accalmie Jérôme part grimper seul une longueur
L’accalmie était de courte durée, il finit sa longueur dans l’adversité :
Déjà le cinquième jour dans la paroi. Le beau temps est revenu. Il fait nettement plus froid.
Je me remets doucement de ma gastro-entérite :
Changement de programme Jérôme et Patrick jettent l’éponge.
On plie notre portaledge :
On dit adieu d’abord à Jérôme.
C’est la dernière fois que nous aurons grimpé ensemble, Jérôme se tuera à Gavarnie quelques mois plus tard le 11 mars 2004.
Puis rapidement vient le tour de Patrick :
Nous sommes bien contents d’avoir récupéré le grand portaledge.
Une journée de break en attendant que la montagne finisse de se purger me fait le plus grand bien :
6ème jour le rêve reprend forme.
Les conditions de grimpe sont parfaites, l’escalade est presque facile :
La corvée c’est de hisser notre maison.
A plus de 6000 c’est éreintant :
Enfin il fait beau et nous aussi après d’illustres prédécesseurs, Michael Kennedy et Greg Child au Mont Hunter ou Athol Whimp et Andrew Lindblade dans cette même face, nous passons nos nuits dans un portaledge suspendus sur de simples broches à glace:
Dans la chambre froide les nuits restent fraîches :
Après une bonne séance de pliage c’est reparti, 7ème jour dans la face :
De jolies longueurs mènent au pied de la longueur dure.
Le granit orangé est tout simplement parfait.
A droite la voie des australiens:
Patrice se lance dans la longueur dure, il doit affronter un tout fin placage de glace vertical posé une dalle de granit parfaitement lisse :
On peut voir les trous à travers la glace.
Bravo à lui, glace 6 dans cette paroi, il a fait parler son talent :
Plus haut le 8ème jour Patrice propose de laisser le portaledge à demeure et de fixer toutes nos cordes.
Ainsi nous n’aurons plus à hisser ce fardeau et le lendemain en partant tôt, nous aurons à remonter les cordes avant de tenter le sommet :
Pour l’instant je dois surmonter un passage surplombant en glace :
Ensuite nous retrouvons des goulottes classiques :
A la tombée de la nuit nous rejoignons notre bercail :
Un peu de repos, de réhydratation, une courte nuit…
Et le 9ème jour est déjà là. Il faut se remobiliser, le Graal est à portée de main, c’est le jour du sommet.
Comme prévu on remonte donc les cordes de nuit puis on se lance dans le mixte final.
C’est au tour de Patrice de ne pas être très en forme :
L’ambiance est vertigineuse.
Il n’y a pas de photo pour l’illustrer mais je dois affronter une longueur extrême M6 à 6750 mètres :
Dans la cheminée finale j’enlève les crampons.
Quelques pitons avec les dégaines en place, viennent nous rappeler le triste sort des 3 coréens qui l’année précédente tentaient la voie Australienne et sont tombés dans la pente finale.
Patrice a recouvré un peu d’énergie, ça tombe bien je suis sec, il trace la pente de neige finale :
Patrice force la corniche sommitale et nous voilà au sommet du Thalay Sagar 6904 mètres, après l’ouverture d’une ligne de glace magique.
Fatigués mais comblés:
Un pieu à neige directement du sommet et c’est parti pour la descente en rappels droit dans la face :
C’est de nuit que nous retrouvons notre dernier camp pour la 3ème et dernière nuit dans cette paroi.
Le matin du 10ème jour ce n’est rien de dire que le réveil est douloureux :
Une fois les paquetages pliés, les rappels reprennent :
Encore un tracé de notre itinéraire.
A la descente nous avons tiré un peu plus directement :
10ème nuit le camp de base avancé!
Demain Jérôme et Patrick viendront nous aider à porter le matériel. Nous fêterons cette réussite…
Une des plus belles pour Patrice et moi! Un échec cuisant pour eux. C’est parfois drôle la vie on pense pouvoir partager un truc exceptionnel avec ses amis et puis ça ne fonctionne pas bien…allez savoir pourquoi, mais c’est une autre histoire!
Des photos d’une netteté incroyable,
Passionnant et émouvant
C est très lourd Stephane ! Chapeau ! Que la montagne est belle et tout aussi impitoyable …
Quelle est belle cette montagne !
C’est rigolo,je suis tombé il y a 2 jours sur la vidéo des russes sur FB…et passer une paire d’heures à fouiner sur cette montagne après,là en venant faire un tour sur votre site par « hasard » je tombe sur ces photos justes fabuleuses et fantastiques de 2003 quel plaisir : merci beaucoup !!
ça fait envie et ça nourrit le rêve…
Pour éviter toute ambiguïté , Je voulais écrire : » c est du TRES lourd Stephane » bien évidemment ! a bientot , Séb .
Merci pour ces photos et l’aventure vécue partagée.
C’est incroyable! Meru vécu par des français! Bravo!