Fracture sociale ?…Non!
Du tibia? …Oui
Emporté par l’ivresse de la montagne, par le succès des jours heureux enchaînés là-haut, j’ai commis, samedi 27 juillet, une erreur.
Une belle.
Chaussé avec des baskets et armé de crampons légers, j’ai cru traverser le névé qui donne accès au pied de la Nasta.
Mais la réalité a été plus rude et je suis parti en glissade comme sur une luge, avec pour seul objectif de choisir en quelques secondes les rochers les plus accueillants.
Le regel de la neige était exceptionnel.
Cette pente, lissée par le vent, tassée par son propre poids et durcie grâce à la nuit claire, avait pratiquement la même consistance que la glace.
Traître situation que je redoute au point d’avoir rédigé un communiqué début juin, par le biais du Club Alpin, sur les dangers de cette neige présente en plein été.
Curieuse sensation d’être pris au piège d’un scénario dont je connaissais parfaitement les règles.
Les dégâts physiques sont déjà lourds.
Certains diront que je m’en sors bien.
D’autres plaideront qu’avec un peu de chance, j’aurai été indemne.
Sur le plan moral, je suis autant tourmenté.
La répétition et l’enchaînement des courses réussies a sûrement altéré mon jugement.
La fatigue accumulée par les départs matinaux et les couchers tardifs a certainement joué un rôle conséquent dans mon manque de vigilance.
Depuis 2003, au rythme moyen de 200 jours de montagne et d’escalade par an, plusieurs situations « limites » se sont présentées.
Grâce à la connaissance du terrain et parfois aussi grâce à la chance, sur le plan statistique, l’accident n’est survenu qu’une fois pour 1400 sorties.
Cela représente à mes yeux un risque limité.
Pour autant, je dois tirer le meilleur de cette erreur.
J’essaierai notamment de respecter les recommandations de prudence valables pour tous les alpinistes et particulièrement pour les guides :
Eviter de prendre des habitudes, de rentrer dans une routine.
Mais aussi, se munir d’un matériel adapté et en bon état doit être plus important que le compromis légèreté / confort.
Il en va de notre préservation.
A vous tous, lecteurs, amis, clients, clients bien souvent devenus amis, prenez soin de vous et rendez-vous en 2010 pour de belles aventures.