Mercantour : goulotte Berhault-stakano en face nord du Ponset
Lundi 20 mai 2013, avec Hugues et Stéphane nous sommes allés en face nord du Ponset faire la goulotte Berhault-stakano.
Dans le Mercantour, la formation de la neige dure et de la glace nécessite une alchimie complexe. Il me semble que l’idéal c’est une période avec de la pluie-neige entre 2000m et 2500m puis le maintien d’une certaine fraicheur.
L’automne est classiquement la période la plus propice pour réunir ces conditions sur une période de plusieurs semaines.
Le printemps est souvent plus aléatoire, la hausse globale des températures fait qu’il faut tomber le bon jour.
Après mi-avril il ne reste bien souvent que les couloirs classiques, comme le couloir ouest du Gelas.
En mai le mixte raide du Mercantour est normalement terminé depuis un moment, mais cette année c’est différent… Le mauvais temps et la fraicheur de cette fin mai nous réserve peut-être encore quelques belles surprises.
Le mur terminal de l’arête ouest du Ponset est complètement plâtré, les 3 longueurs normalement en rocher se transforment en un bon combat en dry tooling ou mixte écossais. So fun!
Beaucoup de skieurs ce jour-là, merci Jean-Pierre pour cette photo qui donne la dimension de la montagne en ce moment!
De gauche à droite les faces nord du Ponset 2828m, au centre du Cayre Barel 2625m, et qui apparait à droite le Grand Cayre de la Madone de Fenestre 2532m :
Vers 5h15 nous partons de la voiture pour une longue approche. Pour rester léger, nous n’avons pas pris les raquettes à neige et rapidement nous devons faire une trace digne de ce nom!
Le Cayre Barel est méconnaissable :
Nous nous sommes relayés. Ci-dessous, Stéphane enfoncé profondément malgré ses grandes jambes :
Hugues bientôt au départ de la voie :
La fin de l’approche nécessite de faire une véritable tranchée :
Nous avons mis environ 3h15 pour rejoindre l’attaque de la goulotte :
Derrière-nous la vue sur le Saint-Robert 2919m, le Gelas 3143m, la Cime Cabret 2938m et le Mont Colomb 2816m est magnifique :
C’est parti, Hugues et Stéphane au départ :
Et là c’est magique, dès les premiers mètres, comme le laissent entendre les lames des piolets on trouve des conditions couic-couic :
Le passage dur de la seconde longueur s’est transformé en toboggan de neige dure.
C’est beaucoup moins difficile qu’habituellement en revanche la plupart des fissures sont bouchées par la neige et la glace et donc en tête c’est exposé :
Hugues en action dans la partie la plus raide de la goulotte.
Mes compagnons me proposent cette décote spectaculaire M4+ au lieu du M5+ habituel :
La suite est également en très bonnes conditions, dans ce contexte jusqu’à l’arête les difficultés atteignent péniblement le M4 :
Hugues va quitter le 1er relais, une bonne petite terrasse où j’ai pu mettre 3 super bons friends :
Par endroits la goulotte est bien encaissée, Hugues dans la 2ème longueur :
Stéphane dans un des petits ressauts, toujours dans la seconde longueur :
Au relais j’ai pu mettre 4 bonnes protections, c’est une chance car dans les longueurs ce n’est pas toujours évident de pouvoir bien se protéger.
La 3ème longueur franchit une étroiture :
Ensuite le haut de la goulotte devient une pente de neige à tracer :
Encore une vingtaine de mètres pour rejoindre l’arête ouest, où il faut bien brasser.
Nous avons mis 4h pour faire les 200 mètres de la goulotte proprement dit :
Stéphane et Hugues à la sortie de la goulotte.
Incroyable toute cette neige, l’arête ouest est méconnaissable :
Evidemment avec toute cette neige récemment tombée les conditions ne sont pas optimum!
Nous allons mettre 4h15 pour faire les 80 derniers mètres! D’abord M4+ :
Encore un relais béton mais étonnamment enneigé pour une voie de rocher!
Dit c’est comment l’Alaska?
La suite.
On doit absolument passer par là.
Nous prenons l’option de gauche qui est plus fissurée. C’est raide et ça fait mal aux bras on propose M5+/M6 :
Stéphane à la sortie de cette longueur difficile :
Stéphane observe la suite, encore une dernière longueur assez raide que nous estimons à M5/M5+ :
Un dernier petit ressaut en M3+ :
8h15 après notre départ dans la voie, nous sommes réunis au sommet, bien contents d’avoir réussi cette belle aventure.
Prévoir le matériel classique pour faire du mixte dans le Mercantour : 2 ou 3 broches à glace, 1 jeu et demi de friends, un petit jeu de coinceurs, quelques pitons et bien sûr un encordement à 60 mètres.
Les faces nord du Neiglier 2786m et de la Pointe André 2679m sont également bien plâtrées. Des itinéraires mixtes en conditions? A suivre…
Nous avons mis 1h45 pour rejoindre la voiture et donc au total 14h15 pour faire la boucle.
Un grand bravo pour cette course, vous avez été bien inspiré et motivé parce que les conditions étaient vraiment pas faciles.
Les longueurs expo en 4+ peuvent bien valoir 5 pour le leader.
L’arête Ouest plâtrée comme cela c’est très impressionnant.
Super journée d’alpinisme !
Beau reportage Stéphane !
J’ai vraiment eu l’impression de refaire cette course.
4h15 sur les 80m de l’arête finale, c’était tellement intense que j’avais pas réalisé.
J’étais en face sur une paire de ski; nettement plus facile à négocier, et de notre point de vue l’image de l’arête terminale disait bien ce que les photos confirment, du genre : » Suis bien sur mes skis moi ! » Mais tout de même mes pensées vous accompagnaient. Une longue journée certainement exaltante 😉
magnifique magnifique magnifique bravo ! une année à gros enneigement, bien malin en cette fin de saison de saisir les opportunités comme celle-ci 😆