Dimanche 14 et lundi 15 juillet, avec Grégory et Delphine, nous nous sommes retrouvés pour découvrir le secteur de la Pilatte, aux sources du Vénéon dans le massif de l’Oisans. Les possibilités d’ascensions y sont nombreuses. Pour ne citer que les classiques, nous avions le choix entre les Bans (3669m), la pointe de la Pilatte (3476m), la pointe des Bœufs Rouges (3516m), le mont Gioberney (3352m). Les conditions météorologiques délicates nous ont naturellement orientés vers ce dernier et sa très classique arête Nord-Est.
Cet itinéraire, tracé rouge sur la photo ci-dessous, a été ouvert par Coolidge, Almer (père) et Bleuer, le 21 juillet 1873 (mais sans chien cette fois-ci), 10 jours pile après la première du Rateau (3809m) :
La montée au refuge de la Pilatte se mérite : 3h45 de marche pour 9.5 longs kilomètres et 880 petits mètres de dénivelé. Grégory et Delphine sont de bons marcheurs :
Heureusement, même en fond de vallon, nous pouvons profiter de la présence des géants du coin. Ci-dessous, notre regard ne peut que difficilement se détourner de la muraille Nord-Ouest de l’Ailefroide (la centrale 3927m et l’occidentale 3954m). Sauf erreur, nous devons la première voie a y être tracée aux niçois Georges et Jean Vernet il y a tout juste 90 ans, le 22 juillet 1929. La voie se déroule au niveau du premier pilier à gauche qui débouche à fleur de nuage sur l’arête de Coste Rouge :
Les chamois, sous la protection du parc national des Ecrins, ont réduit considérablement leur distance de fuite. Nous en profitons grandement :
Des cairns insolites qui donneraient presque un sens au célèbre oxymoron « équilibre instable » parsèment le chemin, étonnant :
Après une courte approche depuis le refuge de la Pilatte, nous sommes à pied d’œuvre au levé du jour. Si on choisit l’attaque de gauche, l’itinéraire commence par un premier bastion rocheux (III) :
Ce 15 juillet 2019, les conditions sont déjà bien sèches. La suite alterne donc crapahute et marche dans les blocs. En fonction de l’aisance de chacun, les mains peuvent être utiles (ou pas…) :
A l’approche du sommet, l’escalade devient plus sérieuse :
Une jolie longueur en IV défend l’accès au sommet. Une belle fissure facilement protégeable permet de compléter l’équipement en place (4 pitons). Au terme de cette longueur, on sera bien avisé de contrôler la solidité des béquets. Ceux-ci n’ont rien sympathique excepté leur fâcheuse ressemblance avec les cairns insolites en « équilibre instable » aperçus la veille :
Delphine prend le temps de se retourner pour observer une petite partie seulement du chemin parcouru :
Le sommet n’est plus qu’à quelques mètres :
Au sommet du Gioberney, la météo est compréhensive. Elle récompense nos efforts d’une éclaircie. Le brouillard se déchire, l’ambiance « mordoresque » est géniale. De droite à gauche, les Bans (3669m), la pointe de la Pilatte (3476m), la pointe des Bœufs Rouges (3516m) :
Entre les nuages la pointe du Sélé (3556m), l’Ailefroide occidentale (3954m) :
Le dôme et la barre des Ecrins (4015 et 4102m, les deux 4000 les plus méridionaux des Alpes), le pic Coolidge (3774m) et l’Ailefroide occidentale (3954m) :
La descente s’effectue par l’arête Sud jusqu’au col du Gioberney (voie normale). Vue plongeante sur le Valgaudemar à l’Ouest :
…. Et vue sur le cirque de la Pilatte à L’Est. Tiens ! Un sommet que nous n’avons pas encore nommé, la pointe Richardson (3312m) à droite de la photo :
Après les cairns en « équilibre instable », voici les cairns casqués. Les cairns originaux ne seraient-ils pas à ces montagnes ce que les nains sont à nos jardins ?
La neige commence déjà à faire défaut sur l’ensemble du glacier de la Pilatte. Elle laisse apparaître de grandes zones de glace propres aux glaciers tempérés. Ca craint, mais c’est beau quand-même :
Comme partout dans les Alpes, la décrue glaciaire est bien visible. En face du refuge de la Pilatte (rive droite du reste de la langue terminale du glacier), d’importants dépôts morainiques résiduels sont entaillés par de profondes griffes d’érosion jusqu’à laisser affleurer le substratum rocheux sous-jacent. Le travail de l’eau est spectaculaire :
Au terme de notre descente du mont Gioberney, nous dominons un court instant le refuge de la Platte. Au second plan, on devine (c’est le mot !) ce qu’il reste de la langue terminale du glacier sous les millions de tonnes de matériaux morainiques :
Ce joli sommet du Gioberney s’est retrouvé être un excellent prétexte pour partager de très bons instants en montagne !